La norme Euro 6e en résumé
- Alignement des chiffres WLTP sur ceux des véhicules hybrides rechargeables (PHEV) avec un consommation supplémentaire.
- Effective depuis le 1er janvier 2025, mais avec effet rétroactif.
- L'autonomie électrique devient plus déterminante pour le calcul des émissions de CO2.
- Impact sur la déductibilité fiscale.
Depuis 2021, la Commission européenne surveille les chiffres de consommation réelle des voitures afin d’évaluer leur écart par rapport à la consommation normalisée WLTP. Les constructeurs automobiles sont tenus de transmettre ces données, bien sûr de manière anonymisée. Une analyse de 600.000 véhicules a révélé que les voitures Diesel et à essence consomment environ 20% de plus en conditions réelles que selon le cycle WLTP, ce qui était une attente de la Commission européenne.
Cependant, l’écart est bien plus important pour les hybrides rechargeables. D’après l’étude, les nouvelles hybrides rechargeables immatriculées pour la première fois en 2021 émettent en réalité 3,5 fois plus de CO2 que leur chiffre officiel (soit 4 l/100 km ou 100 g CO2/km en moyenne). Cela signifie que leur potentiel de réduction des émissions reste sous-exploité.
Michel Martens, directeur du département études de la fédération automobile Febiac, déclare : « Pour encourager les conducteurs à rouler le plus possible à l'électricité, il serait préférable de rendre les coûts de consommation électrique déductibles au maximum, comme pour les voitures entièrement électriques, tandis que les coûts des carburants fossiles pourraient être rendus beaucoup moins déductibles. »
Les véhicules hybrides rechargeables sont sous-chargés
La raison est simple: les conducteurs rechargent trop peu leur batterie et roulent donc moins souvent en mode électrique qu’espéré. En 2021, le réseau de bornes de recharge était aussi bien moins développé qu’aujourd’hui.
«La Commission européenne a constaté que, dans les chiffres de consommation réelle, les hybrides rechargeables parcouraient beaucoup moins de kilomètres en mode électrique que ce que la procédure d’homologation simulait», explique Michel Martens, directeur du département d’études de la fédération automobile Febiac. «Les conducteurs profitent des avantages fiscaux des hybrides rechargeables sans forcément recharger régulièrement leur véhicule. Certains manquent de solutions de recharge, d’autres n’en font tout simplement pas une priorité. Sur la base des données de 2021 qui montrent une utilisation plus importante des carburants fossiles que de l’électricité, la procédure d’homologation des hybrides rechargeables a été modifiée.»
Depuis le 1er janvier 2025, les nouveaux hybrides rechargeables doivent respecter la norme Euro 6e-bis, qui s’applique pour l’instant uniquement aux nouveaux modèles homologués. Cependant, dès 2026, cette norme concernera aussi tous les modèles déjà sur le marché avant 2025 mais vendus neufs.
La méthode de mesure se concentre sur le mode EV
La mesure des émissions de CO2 d’un hybride rechargeable se fait en deux phases: une première avec une batterie complètement chargée et une seconde avec une batterie vide. Les résultats sont ensuite pondérés par un facteur d’utilisation (utility factor). «Ce facteur d’utilisation est une donnée réglementée pour les hybrides rechargeables.
L’enjeu est de savoir dans quelle proportion la conduite électrique est prise en compte dans le test d’homologation par rapport à l’utilisation du moteur thermique. Jusqu’ici, ce facteur était calibré de manière à surestimer la part des kilomètres parcourus en électrique», explique Michel Martens.
Jusqu’à présent, les tests d’homologation des hybrides rechargeables portaient sur une distance de référence de 800 km. Avec la nouvelle norme Euro 6e-bis, cette distance est portée à 2.200 km, puis à 4.260 km en 2027 avec l’introduction de la norme Euro 6e-bis-FCM. «Avec une distance test de 2.200 km, la part des kilomètres parcourus en mode électrique diminue considérablement, surtout pour un hybride rechargeable doté d’une batterie relativement petite. Par conséquent, la part des kilomètres effectués en mode thermique augmente, ce qui entraîne une hausse des émissions de CO2 mesurées», explique Michel Martens.
Plus de «fausses hybrides ?»
Il devient donc plus difficile pour les hybrides rechargeables de conserver de faibles émissions de CO2 dans le cadre de la nouvelle homologation. Quelle en est l’ampleur? «Cela dépend du modèle, mais si un véhicule émettait 20 g CO2/km selon l’ancien test, ce chiffre pourrait être multiplié par 2 à 2,5 dans la nouvelle procédure, atteignant 45 à 50 g CO2/km.»
Cette augmentation des émissions de CO2 (du moins sur le papier) risque de poser un problème pour l’attractivité fiscale de certains hybrides rechargeables, notamment les modèles plus anciens avec une autonomie électrique limitée. Le nombre de véhicules classés comme «fausses» hybrides pourrait augmenter. «En dessous de 50 g CO2/km, une voiture est considérée fiscalement comme un vrai hybride rechargeable. Au-delà, elle est requalifiée en fausse hybride selon la législation actuelle», précise Michel Martens.
Impact sur la déductibilité fiscale
Les tests d’homologation plus stricts pourraient donc faire basculer certains hybrides rechargeables au-delà de ce seuil. «Un modèle qui émettait déjà 15 à 20 g CO2/km selon l’ancien test devrait rester sous la barre des 50 g CO2/km. Mais un modèle qui affichait déjà 40 g CO2/km pourrait voir son taux multiplié par 2 ou 2,5, atteignant 80 à 100 g CO2/km. Il serait alors fiscalement classé comme une fausse hybride.»
Cela aurait un impact direct sur la déductibilité des coûts. Une fausse hybride doit appliquer un coefficient de 2,5 à son taux d’émissions de CO2 ou utiliser celui du modèle thermique équivalent pour calculer la fiscalité des véhicules de société. Ainsi, la déductibilité des coûts pourrait chuter à environ 50% en 2026.
Michel Martens nuance cependant cette notion de «fausse» hybride: «Qu’est-ce qu’une fausse hybride? Ce terme est inexact. Il existe plutôt des hybrides mal utilisés. D’après l’accord gouvernemental, leur déductibilité fiscale restera de 75% jusqu’à fin 2027. Certains constructeurs vont continuer à miser sur les hybrides rechargeables, tandis que d’autres jugeront que cela ne vaut plus la peine».
L'analyse complète de Robin Van den Bogaert figure dans le supplément Fleet & Leasing qui accompagne gratuitement le Moniteur Automobile 1824 (avril 2025).